Groupe tout autre école

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Déconstruire le mot mérite

Le groupe de travail "représentations", qui se donne pour objectif de déconstruire des évidences à travers des vidéos, a choisi de travailler sur deux mots couramment utilisés dans le monde de l'éducation.

L'un de ces mots est "mérite".

Invitation est faire à tou-te-s (y compris celles et ceux ne faisant pas partie du groupe de travail) de partager :

  • ses représentations de ce mot ;
  • des idées pour déconstruire ce mot ;
  • un texte, une vidéo, une photo contribuant à cette déconstruction ;
  • des extraits montrant l'usage habituel de ce terme ;
  • des témoignages qu'il aurait recueillis auprès de proches à qui il/elle aurait posé la question: "qu'évoque pour toi le mot mérite" ?

 

Démarré par Bernard Delvaux dans Groupe tout autre école 5 mars 2017 20:25

Voici quelques premiers éléments sur le concept de mérite.

Quelques expressions communes

  • « Tu l’as méritée (cette punition) »
  • « C’est un élève méritant »
  • « Tu as bien peu de mérite à réussir, tant c’était facile »
  • « Tu as démérité, mon fils ».

Quelques titres du mérite

  • « Mérite sportif »
  • « Ordre national du mérite »
  • « Croix du mérite de guerre »,

Quelques citations

  • « Je m’en consolais, jadis, en me disant que chacun, sur la terre, est payé selon ses mérites » (Octave MIRBEAU, Lettres de ma chaumière : La Tête coupée, A. Laurent, 1886)
  • « Sa modestie rehausse le mérite de sa belle action ».
  • « Dieu nous jugera selon le mérite de nos œuvres » (Bible).
  • « Dieu nous traitera suivant nos mérites » (Bible).

Quelques références sur la méritocratie scolaire

Signification du terme méritocratie

(tiré de l'article de Wikipedia, assez riche)

Le mot de méritocratie est employé pour la première fois par Michael Young en 1958 dans son ouvrage The rise of the meritocraty (L'ascension de la méritocratie). L'auteur de cette « sociologie-fiction » développe l'idée que loin d'être un idéal, ce modèle poussé à ses limites engendrerait « des situations invivables pour les « non-méritants », responsables alors de leur propre sort ».

Le mot méritocratie (du latin mereo : être digne, obtenir, et du grec κράτος (krátos) : État, pouvoir, autorité) établit un lien direct entre mérite et pouvoir. Plusieurs significations pouvant être données au mot mérite ou à celui de pouvoir, le terme est dit polysémique.

Un modèle méritocratique est un principe ou un idéal d'organisation sociale qui tend à promouvoir les individus — dans différents corps sociaux ; école ; université ; grandes écoles ; institutions civiles ou militaires ; monde du travail ; administrations ; État, etc. — en fonction de leur mérite (aptitude, travail, efforts, compétences, intelligence, vertu) et non d'une origine sociale (système de classe), de la richesse (reproduction sociale) ou des relations individuelles (système de « copinage »).

Le caractère consensuel (évident) des termes mérite ou méritocratie

A nouveau, Wikipedia

Selon Duru-Bellat : la notion de mérite a un caractère consensuel ; la méritocratie s'est progressivement « imposée comme un principe de justice central notamment à l’école où elle est au cœur de son fonctionnement ». Le succès et le caractère « consensuel » de la notion de mérite est dû en partie à sa « capacité à concilier l'idéal égalitaire des sociétés démocratiques et les inégalités de fait des positions sociales », toujours selon Duru-Bellat.

Les fonctions du terme méritocratie

Wikipedia, toujours...

Le mot « méritocratie » peut ainsi : être intériorisé comme un principe de justice (parfois qualifié d'utopique) ; et être, en même temps, critiqué comme l'outil idéologique permettant de légitimer un système politique inégalitaire.

Une utopie, un principe pas atteignable mais pouvant guider l’action

Wikipedia

Pour la plupart des chercheurs, la véritable méritocratie, qui offrirait à chacun ce qu'il s'est montré digne d'obtenir, n'a jamais existé, faute par exemple d'avoir prévu suffisamment de mesures efficaces pour compenser le désavantage des individus défavorisés.

Une fonction sociologique d’occultation, voire de justification, des inégalités

Wikipedia

De nombreux chercheurs — constatant que l'ordre social créé ne correspond pas à une véritable méritocratie — la qualifient d« idéologie » méritocratique ou de « mystification », voire de « mythe » à l'effet nuisible […] par exemple en reproduisant les inégalités sociales, tout en les rendant légitimes, renvoyant ainsi les « vaincus du système » à leur seule responsabilité.

Christian Maroy (chercheur canadien en politiques éducatives), discutant d'un ouvrage de Marie Duru-Bellat (Le Mérite contre la justice, 2009), considère que la visée principale du livre est de « relativiser ce discours du mérite et de montrer, dans le domaine scolaire comme dans le domaine professionnel, qu’un principe de justice méritocratique est non seulement loin d’être réalisé pratiquement mais qu’il est, sur le plan de la philosophie et de la pratique politique, clairement insuffisant, voire conservateur. Une société « méritocratique » est en effet une société qui tolère l’inégalité des « places » (du point de vue de leurs rémunérations matérielles ou symboliques), dans la mesure où cette stratification serait seulement le résultat des inégalités de « talents » de départ ou des efforts et du travail consentis pour les acquérir ou les occuper. ».

François Dubet et Danilo Martuccelli écrivent (en 1996) : « le principe méritocratique, faux dans les faits, opère comme un principe de légitimation des positions sociales, la politique des "dons" permettant de masquer tout ce que les positions "acquises" doivent aux positions "transmises". »

Une fonction psychologique de soutien à l’engagement

Christian Maroy, dans sa lecture du livre de Duru-Bellat : « La méritocratie a ainsi une fonction psychologique, tant pour les élèves que les profs, car croire « à un monde (scolaire voire social) juste » encourage à s’investir, à se sentir « maître » et « responsable » de ses actes et de leurs conséquences, bref elle est une « fiction nécessaire » à l’engagement ».

Une fonction de responsabilisation des « vaincus »

Wikipedia

Élise Tenret, sociologue, note — dans Les 100 mots de l'éducation — […] qu'une utilisation idéologique du terme a pu être soulignée : « elle permettrait aux sociétés démocratiques et inégalitaires, de justifier les inégalités sociales […] En effet, si les meilleures places sont occupées par les plus méritants, cela implique que ceux qui n'y parviennent pas doivent assumer la responsabilité de leur échec. »

Pour Bourdieu, le « méritocratisme » est un principe de légitimation, associé à la croyance aux dons qui participe à la reproduction des positions sociales des familles les mieux dotées. En expliquant et en justifiant l’organisation de la société bourgeoise (une sociodicée des dominants), la méritocratie lui assure une relative stabilité

France culture:

Le génial éditorialiste britannique Nick Cohen fait cette remarque : l’ancienne société de classe permettait du moins, quand on était en bas de l’échelle, à se sentir victimes d’une injustice. Aujourd’hui, le système méritocratique nous fait croire que nous sommes responsables de notre situation, quelle qu’elle soit. On pouvait aspirer, avec John Lennon, à être un « working class hero ». Qui voudrait être un « loser » ?

Vouloir l’égalité ou la méritocratie ?

France culture :

Au temps de mon père, écrit Toby Young, la gauche était égalitariste. Aujourd’hui, elle est devenue méritocratique.

Quelques chiffres sur la mobilité sociale

Le degré de méritocratie dans un système social se mesure notamment à travers des indicateurs de mobilité sociale et d'égalité des chances (d'acéder aux places "de choix" quelle que soit son orgigine sociale, son sexe,...)

Dans Alternatives économiques (mars 2017), un article titre "La mobilité socciale est tombée en panne". et un graphiqque titre "la mobilité sociale à l'arrêt depuis 20 ans" (après une évolution positive). On y voit qu'en 2012 un enfant de cadre a 28,7 fois plus de chances de devenir cadre qu'un enfant d'ouvrier de devenir cadre...

Quelques vidéos

... Une, jusqu'à présent.

C'est en espagnol, mais bon, pour le style... :

 

Bernard Delvaux 14 mars 2017 20:41
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